Pourvu que les Bouddhistes se trompent

Dernier tome du chef-d’oeuvre de Manu Larcenet, réussite artistique exemplaire, Blast ne peut laisser indifférent. De par sa forme d’abord, 4 albums denses, sombres, tragiques, bourrés jusqu’à la gueule d’une humanité débordante et d‘une sauvagerie fascinante. Mais aussi par ses qualités graphiques et narratives hors du commun qui en font un ovni éditorial. Ce 4ème tome clôt avec une maestria scénaristique rare, le parcours d’un homme captivant. Une conclusion coup de poing qui vous laissera KO.


La Piste de Kibangou

Résumé du dernier épisode : sorti du piège de la Belle-Hélène (et du premier cycle de ses aventures), Yann Calec se retrouve second sur le Ouessant, dont le commandant, Avron, est assassiné.

La police arrête rapidement le coupable idéal, un docker noir, mais Calec juge cette conclusion un peu hâtive. Tout le monde pouvait tuer Avron, car tout le monde à bord le détestait, et deux détails restent obscurs. Le bref passage à bord de soeur Marie-Madeleine de la Rédemption, et la disparition du chat du mousse la nuit du meurtre !

Promu commandant intérimaire du Ouessant, Calec reprend la mer. A la première escale, une Africaine lui apporte un paquet contenant des diamants. Le paquet étant destiné à Avron, Calec fouille sa cabine pour en savoir plus, et y trouve une photo de mariage représentant Avron et soeur Marie-Madeleine. Décidément, ça sent l’embrouille !

Calec aimerait bien dire deux mots à cette fausse bonne soeur qui, le jour du meurtre, a quitté le cargo pour soi-disant se rendre dans une mission catholique, la mission de Kibangou. Peu après, Calec reçoit un autre paquet, plus macabre — il contient un doigt de son lieutenant subitement disparu, et une lettre menaçant de lui expédier le reste par petits bouts s’il ne rend pas les diamants. Calec ne peut plus rendre les diamants qu’il avait cachés et qui lui ont été volés.

Il se résout donc à aller voir la police locale, qui, une fois de plus, boucle l’affaire un peu vite en concluant à un règlement de comptes entre trafiquants. Calec n’y croit pas. Quelques diamants dans un paquet de clopes vide ne constituent pas à ses yeux un vrai trafic, il continue l’enquête.

Il découvrira la vérité à Kibangou, vérité dans laquelle… le chat avait un rôle. Dans la nuit des ports, sous le soleil du Congo, une aventure torride — avec ce qu’il faut de danger, de suspense, d’humour et de sales types — servie par un dessin lumineux et expressif.

Calec, réembarqué sur le Ouessant et très désireux de revoir Rosana et Iñès, leur petite fille, vient de tracer sur la carte « la route de Rouen ».

Une suite aura donc bien lieu, en l’occurrence avec un cycle qui se déroulera en Asie.


Blacktown

Poursuivi par des patibulaires qui ont l’air de vouloir lui faire la peau, Lapinot atterrit à Blacktown : son saloon, sa prison, ses 150 bouseux managés par un shérif mal luné qui sort son « dictionnaire des sales types » (ses avis de recherche, en version décryptée) dès qu’il flaire un étranger. Pour tout arranger, le patelin est en pleine émeute car on vient de trouver de l’or dans les collines. Ce qui fait qu’au bout d’un quart d’heure, Lapinot est mûr pour le lynchage.

Le rayon de soleil de Blacktown, c’est la jolie Miss Pacard – « jolie » est une façon de parler, les personnages de Trondheim étant affublés de tronches de bestioles plus ou moins farfelues. En tout cas, elle plaît aux messieurs, qui tentent de la séduire en allant fayoter à ses conférences sur la non-violence avec travaux pratiques assortis. Inutile de dire que prêcher la non-violence à Blacktown, c’est voué à l’échec.

L’Ouest, le vrai – revisité par Trondheim, ses loufoqueries feutrées, ses mélancolies désarmantes, ses réflexions sur le temps qui passe et la vie qui s’effiloche. Et surtout, la force de persuasion d’un graphisme culotté, aussi attachant qu’efficace, plein de vibrations subtiles et servi par une mise en couleur hypersensible. A elles seules, les grandes oreilles flasques de Lapinot méritent de figurer dans les annales de la BD, c’est sûr.


Lux

Mars 1953. Alexander marche dans les rues de Londres. À sa main, une sacoche contenant la bombe qu’il va jeter sur le maréchal Tito, lequel effectue une visite controversée en Grande-Bretagne. L’histoire d’Alexandre commence quelque mois plus tôt, quand sa mère, renversée par une voiture, est tuée sur le coup. Décidé à comprendre comment, alors qu’elle était internée dans une institution pour vieilles personnes perdant la tête, elle a pu se retrouver si loin de chez elle, Alexander est pris dans un engrenage terrible qui le voit aux prises avec les services secrets britanniques et des royalistes serbes, un engrenage qui le pousse à se rendre sur l’île de Majorque pour, finalement, se retrouver quelques mois plus tard sur les quais de la Tamise, une bombe à la main…


Pico Love

Pico Bogue et tous ses copains – sans oublier sa petite soeur Ana Ana et ses parents – reviennent enfin ! Dans cet album, Pico va découvrir un sentiment nouveau. Quelque chose qui ressemble à s’y méprendre à… l’amour ! Mais on trouvera aussi quarante-huit pages de gags, de tendresse, d’amitié, de gentils coups de gueule et de réflexions hautement enfantines. Pico Bogue est bel et bien le nouvel enfant terrible de la bande dessinée !


Presque enterrés !

Revoilà Jules, Bastien, Janet et le cochon d’Inde Bidule en route vers l’aventure souterraine — la spéléologie, en clair. C’est l’euphorie générale, à un détail près : Roméo, l’odieux frère de Jules, est du voyage. Il paraît que la spéléologie développe la sociabilité, et Roméo a justement besoin de développer ça.

Le quatrième équipier, c’est Hubert, le fils d’un médecin qui a réussi à tuer sa femme et son bébé en procédant lui-même à l’accouchement. Depuis, ce dangereux personnage a été recyclé maire du village — une occupation moins nuisible à première vue — et Hubert passe sa vie à explorer les grottes de la région. (Un cliché oedipien, le retour à la mère nourricière, d’après Janet.)

Une fois tout le monde descendu au fond de la fosse Draco, Roméo manifeste aussitôt son talent en écrabouillant un pseudoscorpion : après des millions d’années d’adaptation à un environnement hostile, c’est le premier pseudoscorpion qui meurt de façon gratuite, victime de la bêtise humaine. Bravo.

Et puis c’est l’éboulement et la catastrophe : les voilà coincés sous terre. Cherchant une issue. Jules glisse Bidule dans un trou pour voir où ça mène. Bidule revient paniqué, suivi d’une  » main préhistorique  » et, une fois le trou élargi, de l’homme préhistorique entier qui dit :  » Je suis bien content.  » En effet, ce pittoresque paléoanthropologue erre là-dedans depuis des semaines. En piteux état, il est encore capable de s’enthousiasmer pour le paléolithique et de dénigrer le néolithique — dont Roméo, qui continue de se conduire comme un sagouin, semple être un résidu représentatif.

Pendant ce temps, tout le monde s’agite en surface : les sauveteurs, les parents, la télé, et, bien sûr, monsieur le maire, qui s’avère aussi nuisible dans son nouveau statut que dans celui de médecin. Malgré tout, une fois la tribu sauvée, on constate un miracle : Roméo est devenu poli et avenant. On parle que ça ne va pas durer ?

L’expédition, à la fois cocasse et angoissante, nous apprend sur l’histoire de l’humanité des tas de choses qui devraient passionner aussi bien les neuf/quinze ans que les adultes. Le tout avec finesse et humour, grâce au talent d’Émile Bravo, lauréat du Prix Goscinny du jeune scénariste, dont le dessin est également bourré de charme.


Le Trésor du Tonkin

Cochinchine, années 50. Après avoir retrouvé la tombe de son père, Yann Calec découvre que celui-ci a décidément laissé derrière lui un passé agité. Militaire aventurier plutôt en marge des autorités, il a été impliqué dans une sombre histoire d’or détourné. Calec, déterminé à découvrir la vérité, découvre alors l’ancienne maîtresse, une congaï, de son père ainsi que son… demi-frère ! Les révélations abondent pour ce troisième album qui conclut le cycle asiatique de cette formidable série d’aventure signée Kraehn et Jusseaume.


La Mort de Staline – tome 2

Funérailles est le 2e et dernier tome de La Mort de Staline, un vrai faux récit historique signé par deux grands noms de la nouvelle BD française : Fabien Nury et Thierry Robin.

8 mars 1953, la mort de Staline est annoncée. La nouvelle retentit dans le monde entier. Venus des confins de l’Union soviétique, des millions de civils affluent vers Moscou pour rendre un dernier hommage au «petit père des peuples». Tandis que se préparent des cérémonies exceptionnelles, une lutte sans merci fait rage au sein du Politburo. Qui succédera à Staline ? Beria, Malenkov, Khrouchtchev ? Dans ce 2e album de la série, la guerre des prétendants est ouverte…

Ce 2e opus signe la fin de La Mort de Staline, une bande dessinée réaliste et documentée qui dépeint le tableau terrifiant et absurde d’un système totalitaire en pleine folie.


Biotope – tome 2

Un flic noir perdu sur une planète sauvage où les hommes sont devenus fous. Sa partenaire a essayé de le tuer, des savants en mission prennent les armes pour détruire toute trace d’humanité, et toute liaison avec la terre est détruite. Biotope est un polar très noir qui emprunte son décor à la meilleure S.F.

Suite et fin de ce formidable et très remarqué diptyque signé par Appollo, le scénariste de l’Île Bourbon et un Brunö qui se révèle album après album comme l’un des dessinateurs les plus talentueux de sa génération.


Les Chants de la négation

Après le ralliement des Chevaliers de la lumière à l’ordre de Justice, l’Empire semble avoir retrouvé un semblant d’ordre. Mais Fratus le félon court toujours. Avec Wismerhill, ils ruminent leur vengeance contre l’Empereur, Parsifal et le Prince Dragon. Un nouvel épisode, très attendu, de la saga de Wismerhill et de son maître Haazel Thorn, alias la Lune Noire.