Bob de Moor est un véritable phénomène de la bande dessinée. mais cet Anversois monté à Bruxelles, qui fut pendant plus de trente ans le premier collaborateur d’Hergé – et qui, aujourd’hui, le maître disparu, préside aux destinées des célèbres studios de l’avenue Louise, dans la capitale belge – est avant tout un merveilleux créateur de bandes dessinées. pareillement à l’aise dans tous les genres, l’aventure historique avec Cori le Moussaillon, le gag avec Balthazar, l’humour et le suspense avec Barelli, les » choses de la vie » avec Monsieur Tric, il exerce son art avec une égale maîtrise dans tous les styles consacrés : le réalisme, la » ligne claire » ou la caricature. Hergé lui-même, interrogé sur son assistant et ami, devait déclarer : » je n’ai jamais rencontré une telle conscience professionnelle, une telle puissance de travail. « . En effet, après des études à l’Académie des beaux-arts d’Anvers, sa ville natale, il travaille dans un studio de dessin animé, y acquérant l’expérience qui lui sera nécessaire lorsqu’il collaborera plus tard aux studios bruxellois Belvision, tout en livrant déjà des planches à divers magazines flamands. Il est bientôt accueilli au sein de la première équipe du journal » Tintin « , et publie alors aux éditions du Lombard Guerre dans le Cosmos, Le Lion de Flandre, Les Gars de Flandre, les premières tribulations de Monsieur Tric et un grand récit de 62 planches avec Cori la moussaillon : Sous le drapeau de la Compagnie. En 1949, déjà encouragé par Hergé, il crée le personnage de Barelli, jeune acteur dramatique, comédien et détective à ses moments perdus. En 1950, il entre par la grande porte aux studios Hergé. En 1986, il y est toujours, ayant collaboré à l’oeuvre d’Hergé pour les décors des aventures de Tintin depuis On a marché sur la Lune (y compris la refonte de L’Ile Noire) , pour le merchandising, la publicité et les dessins animés, ayant entre-temps inventé d’autres personnages secondaires : entre autres, Riri et Boubou, le trio Vic, Nic et Mic, et Oncle Zigomar.
L’oeuvre de Bob de Moor, éclectique et extrêmement colorée, est aussi l’exact reflet de sa personnalité. Il s’en dégage, de l’une comme de l’autre, un esprit » Saint-Germain-des-près » que Boris Vian lui-même n’aurait pas démenti. chaleureux, volontiers gouailleur sans excès, boute-en-train, pratiquant le calembour comme le croyant sa religion, dominant tous les assemblées de sa silhouette altière et enjouée, il communique à tous ceux qui l’approchent un enthousiasme que rien ne semble vouloir entamer. Et s’il fallait résumer l’auteur et son oeuvre par un seul mot (d’esprit), on ne saurait mieux y réussir qu’en paraphrasant Bergson : » Le rire, c ‘est le propre de Bob! «