Il décroche en 1959 la réalisation d’une publi-B.D. pour la boisson Cécémel et ébauche ses premières créations personnelles dans les mini-récits, ces suppléments à l’hebdomadaire servant de banc d’essai aux débutants. L’Ouest américain le fascine et domine ses premiers mini-livres : « La Loi du scalp » (sur scénario de Delporte en 1959), « Histoire d’Indiens’ (écrite par Maurice Rosy), des animations pour « Les Indiens du Sud-Ouest ».
Après des essais de collaboration dans la mini-bibliothèque avec Serge Gennaux (« Umberto Solferino » en 1963) et Bob De Groot (« L’Homme moyen »), c’est Jacques Devos qui va lui imaginer ses premiers personnages récurrents de western parodique : « Tim et Tom », deux jumeaux impécunieux parcourant le Far West.
Lorsque Salvé est jugé graphiquement mûr pour placer des planches à un format normal dans SPIROU, c’est encore Devos qui lui imaginera, de 1963 à 1968, une soixantaine de gags de « Whamoka et Whikilowat », deux Peaux-Rouges qui apparaîtront en 1966 dans des ouvrages illustrés de la collection « Carrousel » (« Une Journée chez les Indiens » et « La Légende du désert », avec la collaboration de Jamic pour les décors).
Paul Deliège prend la suite de Devos en lui écrivant les scénarios d’une huitaine de mini-récits mettant en scène la tribu des Nez-Cassés et le malchanceux « Petit Cactus », de 1968 à 1969. Un projet de grand récit est en chantier lorsque l’horizon se dégage et permet à l’artiste d’envisager du vrai western en lieu et place de ses fantaisies indianistes. « Lucky Luke » a quitté le journal et la place est à prendre. Un jeune scénariste encore inconnu, employé au labo photographique des éditions, lui propose un thème de série qui est parfaitement dans ses cordes : « Les Tuniques Bleues ».
Séduit par l’idée de Raoul Cauvin, Salvérius crée les personnages sur le plan graphique. Ils se rodent dès 1968 dans des gags et de courts récits complets, puis abordent enfin les prestigieuses séries à suivre. L’antagonisme des héros et une spirituelle dénonciation du militarisme à tous crins vont développer une véritable dynamique du succès qui, rapidement, hisse la série parmi les vedettes de l’hebdomadaire.
Séduit par cette nouveauté, l’éditeur Charles Dupuis convainc Salvérius de quitter l’assurance tranquille de son statut d’employé au bureau de dessin pour se consacrer totalement à cette production. Il lui garantit même de le reprendre à sa fonction au cas, bien improbable déjà, où ces créations ne rencontreraient pas l’adhésion du public. Louis Salvérius va se donner à fond pour relever la gageure.
À trente-huit ans, le 22 mai 1972, la mort le foudroie à la planche 36 du quatrième grand épisode animé par ses créatures, « Les Outlaws ». Lambil acceptera de conclure cette aventure, puis de reprendre les personnages.
Peu expansif, d’une grande rigueur professionnelle, toujours perfectionniste, Salvé a tracé le sillon que poursuivent ses amis Lambil et Cauvin. Ses cavaliers de l’Ouest américain font désormais partie de la légende.